Portrait : Josef Scher (1923-2022)

Par ses enfants Evelyne et Emile Scher

Josef Scher naquit en 1923 à Cracovie dans une famille bourgeoise juive plutôt traditionaliste, ils mangeaient casher, le shabbat et les fêtes étaient respectés. Famille moderne, la mère et les filles avaient un rôle important. Il était le cinquième des sept enfants et il vécut une enfance heureuse. Ses grands-parents et son père ont combattu lors de la 1ère guerre mondiale. A l’adolescence, un de ses amis l’informe qu’il part le soir même seul pour essayer de rejoindre l’URSS. Il décide de le suivre et en informe sa mère en lui rapportant les courses. Catastrophée, elle aura cette phrase qu’il n’oubliera jamais : « mais qui va te laver tes chemises ? »

Il partira le soir même avec une petite valise

Il partira le soir même avec une petite valise et ses papiers d’identité dont il ne se séparera jamais. Il finira par rejoindre l’URSS en passant par l’Ukraine et la Géorgie. Josef maîtrisera parfaitement le russe, l’ukrainien et le géorgien. Il retrouvera Elimelech, un frère de trois ans son aîné. Il aide dans les fermes et des russes souhaitent même l’adopter ce qu’il refuse bien sûr. Il arrivera grâce à un de ses amis à faire venir sa sœur aînée qui rejoindra des cousins partis à temps de Pologne. Grâce à lui et cet ami, elle restera en vie.

Il est enrôlé dans l’armée rouge, avec son frère Elimeilech. Ils combattront notamment à Stalingrad où son frère mourra au combat à ses côtés. Il est désormais officier de transmission dans l’infanterie, il intègre l’école des officiers où il enseignera en tant qu’officier supérieur aux élèves militaires. Une armée polonaise est créée au sein des forces alliées. Il en fait partie en tant que lieutenant et ira jusqu’à Berlin.

Les médailles étaient cachées au fond de l’armoire

Il sera de ceux qui ont libéré les camps, il rencontrera à Berlin sa future épouse, Fella Tyrangiel, rescapée d’Auschwitz. Officier valeureux, il reçut les plus hautes distinctions militaires de l’Armée Rouge et de l’armée polonaise. Il fut décoré de la Légion d’Honneur en France pour faits de guerre. Jamais il ne tira fierté de ces récompenses. Les médailles étaient cachées au fond de l’armoire et seule ma mère nous les montrait en son absence.

Leur famille respective ne sont pas revenues des camps. Ils décident de partir en France. Ils se marient le 30 avril 1949. Ils auront deux enfants, Emile et Evelyne, dont un vit en Israël, trois petits-enfants et cinq arrière petits-enfants. Ce que je peux dire de notre père c’est que c’était un homme d’honneur qui ne s’est jamais plaint, qu’il était doté de très grandes valeurs humaines et morales. Pour lui, la liberté avait une véritable signification et il s’est toujours battu pour que nous puissions marcher la tête haute. Il a toujours tendu la main aux autres sans jamais rien attendre en retour. Il n’a jamais blessé quiconque.Il était autant apprécié des hautes personnalités que de ses amis, voisins, commerçants. Tous ceux qui l’ont approché ne tarissaient pas d’éloges à son égard. 

Durant 73 ans il a vécu une très belle histoire d’amour avec son épouse sans que nous n’entendions un mot plus haut que l’autre. Ils ont réussi à se reconstruire et à former une nouvelle famille en leur transmettant leurs valeurs et beaucoup d’amour. Nous essayons, enfants et petits-enfants, de suivre ces traces…
D’un point de vue religieux, profondément juif, sioniste, il s’était éloigné de la religion suite aux horreurs vécues par les juifs…. mais a néanmoins souhaité que son cercueil portât une étoile de David.
Dans nos cœurs toujours tu vivras. Nous t’aimons…

Album de famille