Portrait : Hena Zysman (1904-1990)
Par Regina Letzt avec le concours d’Alain Kaminski
Hena Zysman née Lect fut membre du Conseil d’Administration des Amis Israélites de France durant 10 ans dans les années 50.
Elle était profondément attachée à cette société mutualiste co-fondée en 1930 par Henoch et Aïda Lect, ses parents morts à Auschwitz.
Elle était née à Varsovie en 1904, et arriva en France en 1927 après son frère Menahem dit Max venu plus tôt avec son père en 1919, ses sœurs Perla et Chana, avant son frère Salomon, et enfin sa petite soeur Fajga qui vint rejoindre le reste de la famille avec sa mère.
Hena se fit appeler Henriette en France, elle était finisseuse, cousait des doublures dans un atelier de confection de la rue Barbette à Paris. Puis un “marieur professionnel”, activité fréquente, rémunérée et reconnue à l’époque, missionné par ses parents, lui fit rencontrer Fajszel Zysman, un bel homme aux dires de ceux qui l’ont bien connu comme sa nièce Regina, la fille de Menahem, entrée en 2022 dans sa centième année et dernier témoin incontournable de l’histoire familiale.
Fajszel se fit appeler Félix, il était casquettier et travaillait pour un fabricant bien établi à Paris. Fajszel épousa Hena, à Paris dans le mitan des années 30, c’était donc Félix et Henriette, ils vivaient rue des Francs-Bourgeois dans un minuscule logement au 6ème étage, dans le Marais. Puis, après avoir attendu quelques années un heureux événement qui tardait à venir à son grand désespoir, Henriette donna naissance à une magnifique petite fille, Ida, le 15 janvier 1939.
Pendant la guerre, Hena était cachée à Mondoubleau, petite commune du Loir-et-Cher, avec sa sœur Perla dite Pauline et son frère Salomon dit Pierre. Sa jeune sœur Fajga dite Fanny se cachait dans une commune voisine et récupéra les deux enfants de Chana, déportée et rescapée d’Auschwitz. Les parents de Hena furent arrêtés à Paris, rue des Amandiers, puis déportés, ils ne reviendront jamais, les époux de Chana et de Perla, arrêtés à leur tour, non plus.
Fajszel s’engagea dans un corps d’étrangers dans l’armée française car comme beaucoup, il pensait que ce parcours faciliterait une obtention de nationalité française. Prisonnier de guerre, il contracta une grave maladie, sera rapatrié en 1945 et décèdera en 1946 à l’âge de 43 ans. Mort pour la France, Hena sera veuve de guerre.
Fajszel avait deux frères, l’aîné fut déporté et reviendra d’Auschwitz, le cadet, pompier, était arrêté au sortir de la caserne de la rue de Sévigné où il était rattaché, il sera déporté, entrera dans le camp en uniforme de pompier de Paris, dont la devise, faut-il la rappeler, est “Sauver ou périr”. Le pompier Zysman aura sauvé mais il ne reviendra jamais d’Auschwitz.
Après la guerre, Hena, seule, devait survivre avec sa petite pension de veuve de guerre, elle démarrera un petit commerce de tricots au Carreau du Temple grâce à sa petite sœur Fanny, qui y était installée et qui vendait des imperméables.
Les années passèrent, Ida, adolescente très difficile aux dires mêlés de bons sentiments de sa cousine Regina, se mariait avec un homme adorable, Jean Epelbaum, adulé par Hena sa belle-mère. Jean, expert-comptable, avait le cœur sur la main, et n’hésitait jamais à rendre service à toute la famille, il était ce que d’aucuns diraient tout simplement, un homme bon, un homme généreux.
Certains qui ont bien connu Hena se souviennent des paroles si élogieuses pour son gendre et rêvent encore aujourd’hui d’une belle-mère qui parle comme cela de son gendre.
Hena nous quittera le 19 juin 1990, fatiguée, une femme de cœur mais celui-ci a fini par lâcher.
Jean Epelbaum sera happé par le Covid le 6 août 2021 à l’âge de 85 ans.
Ida et Jean, Yida et Jeon comme elle les appelait avec son accent yiddish, auront deux enfants, François et Marion, et cinq petits-enfants, Or et Dana chez François, et chez Marion, Allan, Kevin et… Jenna, sans doute en souvenir de Hena.
Bonjour ma grand-mère son nom s’écrivait Chana et non Anna
Bravo pour le portrait et si vous pouvez en faire un sur ma grand-mère ce serai un beau cadeau pour moi
Magnifique portrait d’une grand mère exceptionnelle merci Alain pour ce joli texte si vrai !
Marion