Patronymes : Ils sont tous très bons !

Par Alain Kaminski

Les enfants issus de familles où le yiddish était la langue maternelle se souviendront du premier mot entendu, git que l’on retrouve en gut dans les langues germaniques et qui signifie bon, bien. On se souvient d’avoir été « a git kind », un bon enfant ou d’avoir souhaité « a git gezint », une bonne santé.
Le mot git a formé une quantité industrielle de patronymes et à lui seul méritait une rétrospective. Certes les plus connus sont les Gutman, l’homme bon que l’on pouvait attribuer à ceux dont le prénom hébraïque était Tobie, on retrouve l’hébreu tov qui signifie bon.
Je me souviens des échanges avec mon père qui me passait en revue les patronymes les plus insolites, dérivés de git et transformés par le préfixe gut et il en avait connu beaucoup, dans sa Varsovie natale puis en France. J’apprenais qu’il y avait des Gutnagiel, littéralement un bon ongle et des Gutfinger, là c’est avec les doigts, et dans ce sens c’est la beauté des ongles ou des doigts. Nombreux étaient les Gutfarb la bonne couleur et les Gutfield le bon champ comme les Gutsznader le bon tailleur ou les Gutszmidt le bon forgeron.
La version conservant la forme yiddish git fut moins fréquente, le gut prédominait mais c’est avec le préfixe git que l’on rencontrait les patronymes insolites et mon père avec connu un Gitszabes, et ce personnage, haut en couleur selon mon père, était fier de son nom qui signifie un bon shabbat. N’oublions pas que des juifs polonais s’appelaient Gutnacht qui signifie bonne nuit et Gutentag, littéralement bonne journée.
Mon père aimait jouer au rami avec ses copains quand arrivaient les beaux jours, dans le bois de Vincennes au lieu-dit le plateau de Gravelle. Il y avait un éternel mauvais perdant qui s’appelait Gutszpiler… littéralement le bon joueur.