Portrait : Armand Moscovici (1908-1968)

Par son fils Jacques Moscovici

Il y a des choses qui arrivent. Son père se prénommait Moïse, la famille a pour patronyme Moscovici qui signifie dans les familles roumaines « fils de Moïshé ». Armand était donc doublement le fils de Moïshé. Armand était le fils de Moïse Moscovici et de Rosa née Sodik. Ses parents sont arrivés de Roumanie au tout début du XXème siècle. Ils ont vite intégré l’Association AOR, abréviation toute naturelle pour l’Amicale des Originaires de Roumanie. Décédés avant la deuxième guerre mondiale, ils eurent cinq enfants, Sarah puis Paul, Gustave, Armand, Fernand. Armand naquit le 14 avril 1908 à Paris. Il grandit dans un milieu traditionaliste sans être toutefois très observant. Mais Armand restera très proche du rabbin David Feuerwerker de la synagogue de la rue des Tournelles qu’il fréquentera régulièrement. Le célèbre rabbin, aumônier des armées, et qui par ailleurs sera à l’initiative de l’introduction de l’hébreu moderne au baccalauréat était un proche du rabbin Charles Liché. C’est d’ailleurs ce dernier qui sera l’enseignant pour la bar-mitzvah de Jacques, le fils d’Armand.

Armand, qui avait épousé Béatrice née Goldenberg, et qui fut résistante, elle aussi native de Jassy en Roumanie, seront cachés pendant la guerre dans le petit village de Badaroux en Lozère chez des paysans avec lesquels ils resteront en contact quelque temps. Armand était avant-guerre arbitragiste à la Bourse de Paris, une profession peu connue qui disparaîtra, puis il sera employé de banque, et comptable dans une société commerciale spécialisée en luminaires. Ils vivent à Lyon. A la Libération, Armand apprendra que deux de ses frères Paul, commerçant, et Gustave, dentiste, ont été arrêtés à Paris déportés à Auschwitz, sans retour. Sa sœur Sarah et son frère Fernand, auront survécu miraculeusement.

(Béatrice Moscovici)

Puis Armand monte à Paris, habite rue Birargue dans le IVème arrondissement avec son épouse Béatrice et son fils Jacques né en 1935. C’est à cette époque que l’engagement communautaire d’Armand prend une dimension sociale qu’on pourrait qualifier de visionnaire. L’Amicale des originaires de Roumanie ayant vu ses membres déportés en nombre pendant la guerre, la communauté juive avait besoin d’une aide sociale importante et les sociétés mutualistes allaient jouer un rôle important dans cette volonté de reconstruction.

Avec ses amis Henri Hersco, Maurice Schoulmann, Marie Pjantek, Jean Liberman, Adolphe Cohen, Joseph Ritzker, Avram Safaru, Jules Bercu et d’autres, ils allaient fonder le 13 août 1954 celle qui succédera aux Originaires de Roumanie et qui s’appellera la Fraternité nouvelle. Mais les débuts sont difficiles, les membres se remettent difficilement de voir leurs familles « aux pièces manquantes » après la Shoah. Armand, alors trésorier, allait avec ses amis se rapprocher d’une autre société mutualiste en difficulté, les Amis de la Prévoyance, et ils fonderont une nouvelle Société, Prévoyance et Fraternité. La dynamique était relancée, Armand en sera le trésorier et en 1964, il en deviendra le président.
Il fut très actif et consacrera beaucoup de temps à rendre visite aux rescapés de la Shoah, aux personnes âgées et malades, son fils Jacques se souvient de le voir partir avec des présents, des petits cadeaux, des attentions très appréciées qui réchaufferont les cœurs.

(Changement de titre de l’association)

Armand faisait partie des sociétaires qui avaient souhaité voir leur descendance membre la société qu’i présidait, la communauté juive de Paris lui doit beaucoup à cet effet, son fils Jacques, qui deviendra professeur d’allemand à Paris, reste très attaché au courant mutualiste créé par ses ascendants. En 1968, Armand est emporté par une rupture d’anévrisme, laissant son épouse Béatrice dans une solitude difficile. Béatrice Moscovici quittera paisiblement ce monde en 2011 six mois avant de fêter son centième anniversaire. C’est Salomon Salzmann qui succédera à Armand Moscovici à la présidence de Prévoyance et Fraternité, et en 1986, ladite société intégrera les Amis Israélites de France, les sociétaires et leur famille, les descendants auront toujours cette attache grâce à la volonté d’hommes et de femmes merveilleux comme Armand Moscovici qui fut décoré du Mérite social.

Documents historiques de l’Association des originaires de Roumanie
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