Champ libre : Albert Einstein et le judaïsme
Par Georges Panker, membre du cercle d’Etude de la Déportation et de la Shoah
Albert Einstein naît à Ulm (Allemagne) le 14 mars 1879 dans une famille juive assimilée de la petite bourgeoisie. Peu après la famille Einstein s’installe à Munich où Albert effectuera ses études secondaires dans un lycée catholique.
Bien que non pratiquants, ses parents lui font donner une instruction religieuse et le petit Albert se prend au jeu allant jusqu’à leur reprocher de ne pas observer les règles.
Mais dès l’adolescence, il commence à lire des ouvrages philosophiques et scientifiques et va rejeter définitivement toute pratique religieuse.
En 1895, âgé de 15 ans, il décide de quitter l’Allemagne, à la fois pour échapper à la discipline pesante du lycée et au service militaire. Après avoir rejoint ses parents en Italie, qui s’y étaient installés depuis peu, il émigre en Suisse dont il deviendra citoyen quelques années plus tard.
Après des études à l’Ecole Polytechnique de Zurich (où il fera la connaissance de sa future femme, Mileva Maric, avec qui il aura trois enfants) et ne trouvant pas de poste universitaire à sa sortie de l’école, il obtient grâce à un camarade un emploi à l’Office des Brevets à Berne où il restera jusqu’en 1909.
C’est durant cette période qu’Einstein jettera les bases de la Physique moderne avec la Théorie de la Relativité et avec ses travaux sur les Quanta de lumière qui lui vaudront le Prix Nobel 1921.
Pendant la première partie de sa vie, Einstein se consacre surtout à l’élaboration de la Relativité qui sera achevée en 1915. Le judaïsme est pour lui un état de fait qui ne le préoccupe guère.
C’est lors de son séjour à Prague en 1911 (à l’époque dans l’Empire Austro-Hongrois) où il est nommé professeur à l’Université de langue allemande qu’il reprend contact avec le judaïsme.
La ville comporte un minorité juive importante parmi laquelle les milieux sionistes sont très actifs.
Einstein va être entraîné dans la spirale des évènements consécutifs à la 1ère Guerre mondiale.
Nommé Directeur de l’Institut de Physique de Berlin en 1914, quelques mois avant le déclenchement de la guerre il est très vite en butte à l’hostilité des milieux nationalistes et antisémites, à la fois comme étranger, juif et pacifiste.
Devenu célèbre dans le monde entier en 1919, à la suite de la vérification expérimentale de sa Théorie lors d’une éclipse solaire, il devient la cible privilégiée de ces milieux : ses conférences sont perturbées par des agitateurs et devront être gardées par la police et des articles sont publiés dans les journaux traitant la Relativité de science juive.
Pour échapper à ce climat, il entreprend des voyages à l’étranger : en 1921 il accompagne Chaïm Weizmann aux Etats-Unis en vue de récolter des fonds destinés à la création d’une Université à Jérusalem ; en 1922 il se rend au Japon.
Au retour, il s’arrête en Palestine au printemps 1923 où il séjourne plusieurs semaines. Il a des contacts avec les dirigeants du Yichouv qu’il met en garde sur la nécessité d’une entente avec la communauté arabe de Palestine.
Etant pacifiste et opposé aux doctrines nationalistes, il prône à l’époque la construction d’un Etat bi-national en Palestine. Il se ralliera au sionisme ultérieurement par réalisme politique avec l’arrivée des premiers réfugiés fuyant l’Allemagne nazie.
Dès 1920, il assiste à la montée des nationalismes et à l’émergence du nazisme.
En 1922, Walther Rathenau, Ministre des Affaires Etrangères et d’origine juive, est assassiné par les milieux nationalistes ; cet évènement affecte profondément Einstein, qui déclare que les nazis seront au pouvoir dans moins de 10 ans.
Le 30 janvier 1933, jour de la nomination de Hitler au poste de chancelier, Einstein se trouve aux Etats-Unis. Il ne reviendra plus jamais en Allemagne et s’installera définitivement à Princeton (New Jersey) avec sa seconde épouse Elsa et sa belle-fille Margot qu’il adoptera. Einstein deviendra citoyen américain en 1940 et travaillera jusqu’à la fin de sa vie à l’Institut des Etudes Avancées.
Peu de temps après l’arrivée des nazis au pouvoir, ses biens sont confisqués en Allemagne et ses écrits brûlés.
Dès lors, mettant de côté ses convictions pacifistes, Einstein s’implique directement dans la lutte contre le régime nazi : il se porte caution sur ses biens personnels pour faire sortir d’Allemagne et les accueillir aux Etats-Unis plusieurs scientifiques et adresse une lettre au Président Roosevelt en 1939 l’incitant à entreprendre la mise au point d’une bombe atomique, lettre qu’il regrettera dès Hiroshima.
Contrairement à la croyance générale, il n’a toutefois pris aucune part à la mise au point de la bombe, en raison de la méfiance des autorités à son égard qui le considéraient comme anarchiste et pacifiste.
En 1952, à la mort de Weizmann, Ben Gourion lui propose d’être le second président de l’Etat d’Israël, poste qu’il refuse.
Einstein meurt le 18 avril 1955 à l’hôpital de Princeton. Ses écrits ont été légués à l’Université de Jérusalem.
Sa conception du judaïsme peut être résumée par la formule ’’Ni religion, ni assimilation’’, selon sa propre expression.
Einstein est croyant, mais au sens de Spinoza qu’il admirait et dont il avait le portrait dans son bureau. Il rejette l’idée d’un Dieu personnel qui s’intéresserait au sort des hommes ; pour lui Dieu est révélé par la beauté et l’harmonie de l’Univers.
Bien que n’ayant aucune pratique, il se sent profondément appartenir au peuple juif : le judaïsme est fondé pour lui plus sur des valeurs morales de justice et de liberté que sur les lois de la Thorah.
En même temps il fustigera l’attitude méprisante des Juifs allemands envers les réfugiés venus d’Europe centrale et s’impliquera concrètement dans le soutien aux réfugiés en devenant en 1923 Président de l’Union mondiale OSE ainsi qu’en participant à des galas de soutien pour l’OSE et l’ORT à de nombreuses reprises.
Avec sa mort la communauté scientifique perd l’homme qui a ouvert la voie à la physique du XXIéme siècle et le monde un citoyen.
Un petit commentaire à propos de l’article de Georges Panker sur Albert Einstein:
L’historien Yosef Hayim Yerushlmi dans son live ” Le Moïse de Freud” coll. tel Gallimard, évoque les différentes façons d’être juif: “Tout au long du XIXe siècle, les Juifs qui avaient perdu la foi dans le Dieu de leurs pères, cherchèrent, et lui trouvèrent, un large éventail de substituts laïques inédits. Certains exprimèrent leur judéité en se consacrant avec passion à la nouvelle science historique critique du judaïsme (Wissenschaft des Judentums), d’autres en se dévouant corps et âme à une forme ou aune autre de nationalisme juif, de socialisme, de philanthropie, à des organisations d’entr’aide, à la culture hébraïque ou yiddish. Il y avait, et il y a encore, des Juifs idéologiques, des Juifs culturels et même des Juifs culinaires (“J’aime mieux votre cuisine que votre religion”, déclara un jour Heinrich Heine). (p. 40).
Bonjour et merci pour votre commentaire
Moi je suis plutôt sur le judaisme laique davantage a compatible avec mes orientations scientifiques sur l Evolution de Darwin et mes cours de cosmologie scientifique et aussi mon histoire familiale
Bien amicalement G Panker