Patronymes : Au cœur de Varsovie
Par Alain Kaminski
Mon défunt père me racontait que dans sa Varsovie natale, de la rue Żelazna, le fer en polonais, à la rue Grzybowska, le champignon, en passant par sa rue Ciepła, la chaude, ils étaient fiers de porter des patronymes se référant à la choule, la synagogue en yiddish. Et même presqu’aussi fiers que les Katz, acronyme de Cohen Tsadé ou les Segal, de Sgan Levi. Il y avait des Szulgasser, de gass la rue en yiddish, celui qui habitait dans la rue de la synagogue mais aussi Szulzycer, du yiddish zetz’n s’asseoir, celui qui est tout le temps assis à la choule. Mais aussi Szulrichter le juge à la synagogue, Szulmajster, celui qui y enseigne et le plus fier avec un nom plus fréquent était Szulklaper, celui qui appelle à la synagogue, il frappe de ses mains, il « klap !». Fier aussi Szulzinger, celui qui chante, et même Szulkleyder, de klaydé, la robe en yiddish.
Au 19 de la rue Ciepła où demeurait mon père, il y avait un vieux monsieur très gentil, c’était Szulszleper, littéralement le mendiant de la synagogue. Mon père qui rêvait de me voir naviguer en yiddish et en polonais m’expliquait qu’il ne fallait pas confondre avec Szulenszlepner du yiddish aynchlouf’n, s’endormir, et donc celui qui s’endort tout le temps à la synagogue. D’ailleurs, dixit mon père, il y en avait un autre au coin de la rue Chłodna, la fraîche, et de la rue Biała, la blanche. Ces patronymes liés à la synagogue sont savoureux à condition de bien noter que le sz se prononce ch comme chat, le cz tch comme le tchoulent et le szcz lui se prononce chtch comme la ville de Szczecin. Prononcez tout simplement… chtchetchin.